mercredi 4 octobre 2017

L'affaire Maldonado : l'ONU s'en mêle [Actu]


Dans l'affaire de la disparition du jeune Santiago Maldonado, en Patagonie, au début du mois d'août, le Bureau régional du Haut Commissariat aux Droits de l'Homme de l'ONU a fait, hier, injonction à l'Argentine de respecter ses engagements internationaux en respectantn dans l'instruction en coursn les standards judiciaires définis par les accords dont elle est signataire.

Le chef du Bureau pour l'Amérique du Sud souligne que l'enquête n'a toujours pas donné de résultats satisfaisants (on n'a toujours trouvé aucune trace du disparu) et qu'il convient d'examiner si, oui ou non, la gendarmerie (1) est impliquée dans l'affaire (le communiqué ne se prononce pas sur la question) et s'il s'avère qu'elle l'est, de prononcer rapidement les sanctions qui s'imposent contre les auteurs directs des faits (qui constitueraient alors soit un enlèvement suivi de mort soit un homicide, intentionnel ou accidentel) et à leurs supérieurs hiérarchiques.

Ce matin, seuls Página/12 (qui est dans l'opposition) (2) (3) et l'agence nationale Télam ont rendu compte de ce communiqué. Les autres quotidiens parlent de l'affaire mais taisent l'existence de cette déclaration onusienne.

Pour aller plus loin :
lire l'article de Página/12 sur le communiqué de la ACNUDH (sigle espagnol)
lire la dépêche de Télam sur le même sujet
lire l'article de Página/12 sur l'irruption des gendarmes à l'université de Rosario (Santa Fe)
lire le communiqué (en espagnol) de la ACNUDH

Ajouts du 5 octobre 2017 :
mettant Página/12 au comble de la colère, ne voilà-t-il pas que Alfredo Astiz, le fameux "ange blond de la mort", bourreau au service de la dernière dictature militaire, qui passe une nouvelle fois en jugement pour certains de ses crimes, a utilisé son dernier temps de parole avant le retrait de la cour pour défendre les gendarmes qui, en débarrassant l'Argentine de Maldonado, n'auraient fait que défendre l'intégrité du territoire contre de supposés "dangereux sécessionnistes" (comme autrefois, en torturant, il prétendait défendre la patrie contre la subversion et la sédition). Cette déclaration ignoble, comme d'habitude chez ces criminels qui continuent à distiller leur venin dès qu'ils ont la parole en public comme en privé, a suffi pour que le quotidien en fasse sa une et dénonce dans l'affaire actuelle une répétition des crimes commis sous le régime putschiste de 1976-1983. Lire cet article.
Sur ces mêmes déclarations de l'accusé, lire l'article de La Nación, qui rapporte la même impénitente revendication de ses actes sous prétexte de défendre le pays, le même refus de reconnaître la légitimité du tribunal, etc., sans toutefois y lire les mêmes similitudes avec l'actualité.

Ajouts du 19 octobre 2017 :
le 17 octobre vers midi, dans une rivière très proche du lieu d'intervention de la gendarmerie à la fin juillet, on a trouvé un corps sans vie, habillé comme Santiago Maldonado au moment de sa disparition le 1er août. La justice a décidé de transférer ce corps à la morgue nationale de Buenos Aires où les médecins légistes doivent effectuer l'autopsie et mener les examens d'identification. Le transfert par avion ne s'est réalisé qu'à l'aube, aujourd'hui, soit près de 48h après la découverte du cadavre. Et à quelques jours de premier tour des élections législatives de mi-mandat. C'est dire les lenteurs de la procédure argentine.
La famille du disparu se refuse à faire une déclaration définitive sur l'identité du défunt mais accuse déjà le gouvernement, qu'elle identifie à l'Etat comme cela se passe si souvent en Amérique du Sud.
Toute la presse du pays est suspendue aux résultats des examens. Le gouvernement aussi.
Sur le corps, hier, on a trouvé la carte d'identité de Santiago Maldonado et d'autres éléments lui appartenant.
Hier, les articles étaient les suivants :
Página/12
La Prensa
La Nación
Clarín



(1) De manière très étrange hier, la gendarmerie a violé l'enceinte de l'université nationale de Rosario pour empêcher une réunion politique de soutien à la famille et de revendication de recherches efficaces. En Argentine, les universités disposent en effet d'un statut d'autonomie et les forces de l'ordre ne peuvent pas entrer, à moins d'être sollicitées par le recteur ou envoyées sur mandat d'un juge. Ceci ne les ont jamais empêché d'intervenir dans des locaux universitaires, sans mandat ni autorisation, à plusieurs reprises sous diverses dictatures. Là encore, aujourd'hui, seul Página/12 dénonce le fait que la rédaction a même mis à la une.
(2) Lundi, dans sa conférence donnée à Paris, Estela de Carlotto a dénoncé la situation économique de Página/12 qui serait en grand danger de mettre la clé sous la porte et qui ne pourrait déjà plus payer ses salariés. Estela de Carlotto a également déploré la prochaine vente de la chaîne de télévision C5N, qui défend actuellement les mêmes positions que Página/12 et va changer de ligne éditorial, à moins que l'arrêt de la AFIP (administration fiscale argentine) mette fin au processus de vente. La AFIP a en effet interdit l'opération.
(3) Ceci dit, le même journal qui monte ainsi le ton sur cette affaire prend fait et cause pour les séparatistes catalans et contre le roi d'Espagne alors que le référendum d'auto-détermination de dimanche dernier non seulement ne respectait pas la constitution espagnole mais était, par la loi locale qui l'a institué, contraignant dans ses résultats, sans qu'aient été définis ni un quorum ni une majorité qualifiée et sans qu'il y ait de listes électorales pour vérifier le droit de voter des électeurs se présentant devant des urnes opaques (drôle de conception de la démocratie).