mercredi 13 septembre 2017

Vázquez veut passer à autre chose en s'appuyant sur Topolansky [Actu]

Lucía Topolansky a choisi de se faire photographier au milieu de quelques poules fières comme des coqs
tandis que leur éleveuse porte un vieux pantalon de survêtement tout bouloché !
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Avant-hier, le président uruguayen Tabaré Vázquez n'avait qu'une hâte : refermer au plus vite la parenthèse du désastre politique que constitue, depuis dimanche, la démission contrainte de Raúl Sendic, le premier vice-président de son actuel mandat, cerné par les scandales de malversation et d'usurpation de titre universitaire. Cet épisode spectaculaire, qui a tourné tous les regards du sous-continent vers Montevideo, s'intègre dans une longue histoire d'avatars touchant les vice-présidents uruguayens, qui président aussi le Sénat, comme dans l'Argentine voisine et selon le modèle offert par la constitution des lointains Etats-Unis.

La une de El País hier, 12 septembre 2017
Vázquez se rend au pupitre pour délivrer son discours au pays devant le gouvernement
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Devant le conseil des Ministres, Tabaré Vázquez, qui n'était pas sorti de chez lui dimanche, a engagé tout son gouvernement à regarder vers l'avant, sans plus s'attarder sur le passé. Circulez, il n'y a rien à voir, comme l'a titré El Observador à la une dans son édition d'hier, illustrée par une photo-caricature du chef de l'Etat. Vásquez a interprété la campagne d'opinion qui a abouti à la démission de Sendic comme un épisode brutal, un harcèlement tel qu'on en a jamais vu dans le pays. Toute la presse a repris ces propos qui ne reflètent évidemment pas l'opinion du citoyen lambda, écœuré par l'attitude de ce vice-président qui s'était embourbé dans ses mensonges et ses dénégations depuis de nombreux mois.

Une de La República de ce matin
de gauche à droite : Mujica, Topolansky et Vázquez
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Aujourd'hui, la nouvelle vice-présidente prête serment et prend ses fonctions, après avoir laissé son siège sénatorial à un autre membre du MPP, son parti d'origine, fédéré dans le regroupement de toute la gauche gouvernementale, le Frente Amplio, organisation politique de la gauche plurielle (1) qui structure la majorité nationale actuelle, depuis le premier mandat de Tabaré Vázquez, et qui a été bien mis à mal par ce fort peu glorieux incident.

La une de El Observador d'hier
On peut traduire le gros titre par notre expression :
Circulez, il n'y a rien à voir !
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Lucía Topolansky est la première femme à accéder à ces fonctions dans l'histoire de la République Orientale de l'Uruguay. Elle a soixante-treize ans. Elle est l'épouse de l'ancien président José Mujica, connu pour son verbe haut et la frugalité de sa vie quotidienne, qui n'est pas sans rappeler certains héros désintéressés de l'époque indépendantiste, l'époque fondatrice pour ces pays du Cono Sur. Lucía Topolansky est agricultrice et, comme son mari, elle exploite sa propre entreprise agraire, en parallèle avec son action politique, dans un pays où l'agriculture est source de prestige pour qui possède ses terres (2). C'est une militante de gauche de très longue date, à l'engagement incontestable de ce côté-là du spectre idéologique national (et continental). Bien entendu, pour cette même raison, elle n'est ni aimée ni respectée par de (trop) nombreux citoyens de droite qui l'insultent copieusement dans les commentaires qu'ils laissent sur les sites Internet des quotidiens, dissimulant avec courage leur identité dans l'anonymat de leurs pseudos.

Une de La República hier
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Lucía Topolansky se veut un pont entre les gens (3) et une négociatrice au service du pays, pour ce qu'il reste à couvrir du second mandat du Président Vázquez, qui avait gouverné avant son mari, avant de lui succéder, puisque la constitution uruguayenne, qu'il a refusé de faire modifier, interdit au chef de l'Etat d'exécuter deux mandats consécutifs.

Pour en savoir plus :
hier
lire l'article de LR21 (journal en ligne)
aujourd'hui
lire l'article de une de El Observador, qui publie une interview de Lucía Topolansky



(1) pour utiliser une expression qui fit florès en France mais qui ne reflétait pas une réalité politique bien solide, à en croire les résultats électoraux successifs et l'actuel paysage éclaté de la gauche nationale.
(2) C'est une réalité sociale et symbolique dans toute l'Amérique du Sud, Brésil compris.
(3) Remarquez l'emploi de la sémantique du Pape François, le pape argentin qui a mis ses paroles en actes sur le continent, en s'impliquant à Cuba et, la semaine dernière, à nouveau, en Colombie !