Voilà
deux ans que j'ai laissé passer l'occasion que m'offre cette
Semaine du Goût de vous entraîner dans la gastronomie
argentine.
Pour renouer avec les bonnes habitudes que j'avais
instaurées dans les premières années de ce blog,
qui a maintenant plus de quatre ans, je vous propose aujourd'hui une
petite recette toute simple d'un pain festif, brioché et
feuilleté, la cremona, qui se marie à la perfection
avec le thé, le café, le chocolat ou le lait chaud, et
qui bien entendu a plus que des affinités avec le mate, cette
traditionnelle boisson argentine, amère et tannique, qui réunit
aussi fréquemment les amis que l'anisette en Provence ou la
bière dans le Nord de la France et en Belgique...
Selon
toute apparence, cette brioche rustique doit son nom à la
ville homonyme située en Lombardie (Italie du nord), dont il
est probable qu'elle provient.
Pour
faire une cremona, il faut disposer d'un bon four montant à
210-240°, avec une porte aussi hermétique que possible. Un
four ménager n'aura jamais l'efficacité d'un four
professionnel mais ici, sa qualité est capitale pour obtenir
un bon résultat (en général, c'est le cas pour
toutes les recettes de boulangerie à pâte levée).
Pour
faire une cremona pour 4 personnes, on réalisera deux appareils séparés et nécessitant tous deux une température douce. On utilisera de la
farine blanche type 55 (selon la classification française).
En
Argentine, comme en Espagne aussi d'ailleurs, le commerce courant ne
propose qu'une seule classe de farine blanche de blé et qu'une
seule classe de farine complète, qui, comme ici, bénéfice
de la vogue, embryonnaire là-bas, du biologique (même si
le son et le bio ne sont en aucun cas liés l'un à
l'autre, mais bon, c'est ainsi, c'est une mode en pleine expansion).
Les professionnels ont peut-être un éventail de qualités
de farines de froment, mais au regard de ce que l'on trouve dans les
confiterías, je n'en suis pas du tout sûre...
1er
appareil : fourrage à feuilletage
Mélanger
au robot ou à la main 25 gr de farine et 75 gr de saindoux,
que l'on peut remplacer par du suif (comme on le fait
traditionnellement dans la cuisine ashkénaze par exemple) ou
l'une ou l'autre margarine de cuisson que l'on trouve dans le
commerce. Le résultat sera sensiblement le même. En
revanche, si vous voulez utiliser du beurre, vous obtiendrez sans
doute un pain excellent mais son goût et sa consistance
n'auront rien à voir avec cette spécialité
argentine...
2ème
appareil : pâte levée
Délayer
dans un peu d'eau tiède 10 gr de levure de boulangerie fraîche
ou un quart de sachet de levure lyophilisée (en général,
les sachets sont de 8 gr,ce qui correspond à un cube de 50 gr
de produit frais). Si vous voulez donner une touche légèrement
française à votre cremona, vous pouvez remplacer l'eau
par du lait, tiède lui aussi. Et si vous souhaitez enfin
donner un peu plus de force à votre levure, ajoutez-lui un
morceau de sucre et laissez-la pousser une vingtaine de minutes, à
couvert, près d'un radiateur (il ne faut pas qu'elle prenne
froid).
Une
fois votre levure prête, pétrissez au robot ou à
la main 250 gr de farine, 15 gr de matière grasse (saindoux
dans la recette originale) et la levure en ajoutant de l'eau jusqu'à
obtenir une pâte ferme que vous pourrez abaisser au rouleau à
pâtisserie.
Pour
faire plus riche, plus luxueux, plus festif, vous pouvez remplacer
l'eau par du lait (mais là-encore, vousvous éloignerez
de cette cremona du quotidien argentin)
Laissez
reposer au moins 30 minutes ou, mieux, 1 heure, dans un récipient
couvert, à une température ambiante douce, après
avoir légèrement fariné votre pâte.
Après
cette première levée, abaissez la pâte dans son
récipient et ajoutez-y une pincée de sel pour un second
pétrissage. Les recettes disent en général de
saler la pâte dès le début mais le sel a la
propriété d'entraver la levée puisqu'on
l'utilise justement dans la conservation des aliments pour éviter
qu'ils ne fermentent !
Vous
pouvez procéder à une seconde levée ou vous
attelez tout de suite pour passer au feuilletage (la seconde levée rendra
le gâteau plus léger et lui donnera un aspect plus
gonflé à la cuisson).
Feuilletage
et mise en forme
Etalez
votre pâte en une abaisse beaucoup plus longue que large. Quand
l'abaisse a l'épaisseur d'un demi-doigt,
étalez au centre du rectangle ainsi obtenu votre appareil à
feuilletage et repliez la pâte sur elle-même en enfermant
bien le mélange farine-saindoux ou farine-margarine à l'intérieur (il ne faut pas qu'il déborde). Donnez un coup de
rouleau pour homogénéiser le tout et donnez le premier
tour de feuilletage : repliez la pâte trois fois sur elle-même
dans le sens de la longueur, en portefeuille, avant de l'abaisser à
nouveau sur la même épaisseur et continuer encore pour
trois tours de feuilletage.
Après
le dernier tour, ébarbez la pâte en y
découpant un rectangle très long et bien rectiligne, de
la largeur d'une main à peu près. Fariner-le légèrement et repliez le rectangle ainsi fariné sur lui-même, en deux parties, l'une sur l'autre sur toute sa longueur. Soudez
délicatement les bords (ils s'entrouvriront d'eux-mêmes
pendant la cuisson) et déposez le tout sur une feuille de
papier à four, d'où vous ferez glisser la cremona sur
votre plaque de cuisson.
A
partir des bords légèrement soudés, entaillez
profondément et régulièrement la pâte sur
toute sa longueur, en respectant une distance de deux doigts joints
entre chaque entaille, et jusqu'à la moitié ou les 2/3
de la profondeur (ne pas atteindre la pliure) puis rapprochez les
deux extrémités du rectangle pour former un cercle plat
sans le fermer complètement. En s'ouvrant, les entailles
permettent à la pâte de prendre sa forme sans se
déchirer.
Laissez
lever une dernière fois, à couvert, et enfourner à
four chaud (porté à 210 - 240° C en fonction des performances de votre four, 15 mn. auparavant).
Surveillez la cuisson qui dure une vingtaine de minutes selon votre
four et la qualité de vos ingrédients.
Si
vous souhaitez donner un aspect brillant à la cremona, passez
délicatement à sa surface et au pinceau un jaune d'œuf
délayé dans de l'eau, avant d'enfourner.
La
cremona se déguste froide. On coupe au couteau ou on casse à
la main les créneaux qui présentent un joli feuilletage en
éventail. C'est un gâteau de bonne conservation (il dure
facilement 2 à 3 jours sans rassir ni rancir, à l'abri, dans
un sachet de boulangerie ou une huche à pain).
Cette
recette, que j'ai traduite et adaptée à notre marché
européen, est extraite du livre de Delfina Aristizábal,
Secretos de la Panadería Casera, paru à Buenos Aires en
1999, aux Editions Albatros.
Il
existe un certain nombre d'autres recettes. En cliquant sur le lien,
vous pouvez en trouver une autre (en espagnol) sur le site Internet hispanophone Recetas Simples, dont est extraite l'une des photos d'illustration de
mon article.... Vous y trouverez même une vidéo de la
recette.
Pour
aller plus loin :
visiter
le site Internet de la Semaine du Goût.